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JUSTICE
Un procès sous haute surveillance.

Le procès tant attendu des deux auteurs présumés des attentats de 1995 s'ouvre ce mardi premier octobre, peu après 10 heures. Il doit déterminer les responsabilités respectives de deux algériens dans trois des six attentats revendiqués par le GIA en 1995 notamment par un courrier envoyé en août de la même année au président Jacques Chirac. Les mesures de sécurité ont été renforcées tout autour du Palais de Justice de Paris. A l'intérieur, une grande salle a été ouverte pour permettre aux parties civiles et aux journalistes de pouvoir suivre l'intégralité des débats sur un écran vidéo. Les victimes espèrent grâce à ce procès obtenir enfin des explications mais il est peu probable qu'elles y parviennent; les deux hommes présents dans le box ont toujours refusé de le faire.


Mercredi 2 octobre 2002.

Marie-hélène Mino

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"La logique veut que je conteste. Il y a beaucoup trop de contradictions dans la lecture des faits. Ça confirme le refus d'autres nations d'envoyer à la justice française certains témoins ou accusés des faits", déclare Boualem Bensaïd avec un large sourire aux lèvres.

  Les blessés et familles de victimes sont nombreuses ( près de 200) à avoir fait le déplacement pour assister à cette première journée d'audience. Pour eux, c'est un jour important : cela fait sept ans qu'ils attendent le moment de pouvoir enfin rencontrer le regard des deux accusés.
Selon Françoise Rudetzki, la fondatrice de SOS-Attentats, un procès a toujours un effet thérapeutique et "les familles des personnes décédées souhaitent être présentes en mémoire des leurs et aussi pour pouvoir s'exprimer. Les blessés seront là pour les soutenir".
Peu à peu, la salle se remplit, mais en dépit de l'émotion largement palpable, le procès s'ouvrira dans le calme et la dignité. Les parties civiles n'espèrent obtenir ni remord, ni demande de pardon de la part des protagonistes présents, elles redoutent surtout des propos provocateurs dont ils ne sont jamais avares. Préparées depuis longtemps à cette audience, les victimes présentes ainsi que leurs familles souhaitent obtenir des explications sur les motivations des terroristes et sur certains points de ce dossier, restés toujours bien obscurs.

Dans le box des accusés, il manquera bien trois personnes : le chef suprême du GIA, Djamel Zitouni et Ali Touchent, tous deux décédés. Quant au troisième, le trésorier Rachid Ramda, il reste détenu au Royaume-Uni depuis novembre 1995 mais la justice britannique refuse son extradition.

Une première journée difficile :

Un frisson envahit la salle lorsque Boualem Bensaïd et Smaïn Belkacem pénètrent à leur tour dans la salle d'audience. Le premier entre avec son habituel sourire ironique aux lèvres. Il jette un bref regard à la salle avant de s'asseoir. Quant au second, il ne regardera pas plus les victimes, que son complice.
Assis dans le box, ils refuseront même de se lever comme le veut l'usage lors de l'entrée de la Cour.

Les deux algériens de 34 ans montreront une certaine lassitude voire même un certain agacement pendant la lecture des charges retenues contre eux ainsi qu'à l'appel des témoins. Ils devraient être une quinzaine à se succéder à la barre pendant ces cinq semaines. Parmi eux, Nasserdine Slimani, un témoin à charge pour Boualem Bensaïd. Condamné en 1999 pour son appartenance au réseau, il a purgé une peine de 7 ans de prison. Ses déclarations faites lors de sa garde à vue avaient été accablantes pour Boualem Bensaïd. Mais mardi, il ne s'est pas présenté. Depuis sa libération il a disparu de la circulation. Alors, la Cour sans vraiment trop y croire a ordonné aux forces de police de le rechercher pour l'audience du 14 octobre.
Le tribunal commence par aborder le cas de Rachid Ramda, le financier présumé du réseau «retenu depuis sept ans par les autorités britanniques qui n'ont pas exécuté l'extradition" souligne le Président, Jean-Pierre Getti qui "disjoint" son dossier de ce procès. La comptabilité de Rachid Ramda retrouvée à Londres, ne sera donc pas utilisée pendant les débats. Il devrait être jugé ultérieurement à Paris.

Les premières heures du procès ont été consacrées à la lecture fastidieuse des arrêts de renvois, 90 pages rappelant les faits et le résumé de l'accusation. Puis ce fut l'énoncé de la très longue liste des victimes : 203 noms. Moment particulièrement difficile et chargé d'émotion pour les parties civiles. Pendant ces quatre heures, les deux hommes eux, resteront impassibles.

Seul Boualem Bensaïd s'est exprimé en début d'audience pour protester contre la tentative de constitution de partie civile d'une "association internationale de victimes du terrorisme" (FIAVT) fondée en 1999 et basée à Alger mais jusque là inconnue. Une démarche incompréhensible et jugée " politiquement douteuse " par les parties présentes à l'audience. «Nous ignorions l'existence de cette association et nous nous méfions de la compassion dans la publicité» déclare Maître Holleaux, l'avocat des victimes.
Me Salim Djalabi, avocat au barreau d'Alger a tenté de justifier cette demande en expliquant que "Les faits sont liés directement aux événements en Algérie et il y a des victimes algériennes". Invité par le tribunal à s'exprimer Bensaïd proteste vivement en sous-entendant que l'association représenterait en fait le pouvoir Algérien. "Ce sont les premiers accusés qui viennent se constituer en victimes et ça, c'est le monde à l'envers". lance-t-il. La demande de la FIAVT suspectée d'être un sous-marin de l'ambassade d'Algérie sera repoussée par la Cour, cette association n'existant pas en 1995, au moment des faits.
C'est "une opération diligentée par les autorités algériennes", a estimé au cours d'une suspension d'audience la déléguée générale de SOS attentats Françoise Rudetzki qui en a profité pour dénoncer " l'opération diligentée par le gouvernement algérien qui, d'ailleurs, n'a jamais coopéré avec le juge Bruguière sur le détournement de l'Airbus d'Air France en décembre 1994». ".

Les deux hommes persistent à nier les faits

La fin de la journée fut marquée par les déclarations des deux accusés qui ont nié les faits reprochés.
"La logique veut que je conteste. Il y a beaucoup trop de contradictions dans la lecture des faits. Ça confirme le refus d'autres nations d'envoyer à la justice française certains témoins ou accusés des faits", déclare Boualem Bensaïd avec un large sourire aux lèvres. Allusion à peine voilée à l'absence de Rachid Ramda et aux violences policières qu'il dit avoir subies pour lui extorquer ses aveux.
Quant à Smaïn Aït Ali Belkacem, s'exprimant en arabe, il conteste à son tour :
"J'ai eu des difficultés avec la justice depuis cinq ans. Je vous expliquerai. J'ai la preuve que je n'étais pas présent à Paris" au moment des attentats.
"Vous contestez l'intégralité des faits ?", leur demande le président.
"Absolument!" répondent les deux hommes.

De lourdes preuves

Mais pour Me Guillaume Barbe et Benoît Dietsch avocats de Bensaïd, et Me Philippe Van der Meulen défenseur de Belkacem, les charges restent lourdes.

Ainsi des empreintes digitales de Boualem Bensaïd ont été retrouvées sur un morceau de scotch qui entourait la bonbonne de gaz déposée dans la poubelle près de la station de métro Maison-Blanche.
Devant le juge, il a d'ailleurs reconnu plusieurs fois avant de se rétracter avoir eu l'idée de cet attentat pour "venger" la mort de Khaled Kelkal, survenue une semaine plus tôt au lieu-dit " Maison-Blanche " près de Lyon.
Quant à l'explosion de Saint-Michel, l'accusation s'appuiera sur des notes que les enquêteurs ont interprétées comme des repérages et sur les accusations d'un autre membre du réseau, Nasserdine Slimani, pour tenter de démontrer la culpabilité de Bensaïd.

En ce qui concerne Saïd Belkacem qui lui aussi est passé aux aveux avant de se rétracter, les enquêteurs ont trouvé sur lui un coupon de carte orange qui démontre qu'il a quitté la station Javel, située à trois stations de celle du Musée d'Orsay, quelques minutes seulement avant l'attentat, ce qui est corroboré par une bande graphique de la rame qui a explosé.

Leurs avocats respectifs préfèreront sans doute demander des éclaircissements sur certains points du dossier laissés sans réponse notamment sur le rôle exact joué par le GIA dans ces attentats et ils ne manqueront pas non plus de réclamer des explications sur le chef présumé du réseau, Ali Touchent qui a échappé comme par miracle à toutes les arrestations.
Si le calendrier de l'audience n'est pas modifié, le verdict est attendu pour le 31 octobre.
L'examen sur le fond débutera mercredi avec l'interrogatoire de l'ancien responsable de la police antiterroriste, Roger Marion. Un haut responsable qui reste très attendu par la défense.

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