fidès
Fidès







Photos     Courrier    Forums    Service    Newsletter    Portfolio   
JUSTICE
une interpellation et une garde à vue musclées.

Cette deuxième semaine d'audience devrait être consacrée à l'attentat survenu à la station RER, Saint-Michel pour lequel Boualem Bensaïd est soupçonné d'être l'auteur principal, ce qu'il a toujours nié.


Lundi 7 octobre 2002.

Rachid Halloui

• Imprimer l'article
• Envoyer l'article

Bensaïd ne s'est pas fait prier pour raconter son arrestation, intervenue dans la soirée du premier novembre 1995, uste devant son domicile parisien du XVIème arrondissement.

 

En ce début du mois de novembre 1995, Bensaïd et Belkacem sont étroitement surveillés depuis plusieurs jours, mais ils l'ignorent encore. Depuis la mort de Kelkal, l'homme qui a tenté de faire sauter le TGV Lyon-Paris, la police progresse à pas de géant : elle dispose de suspects et les deux hommes sont sur la liste.

Pendant cette journée, la cour est revenue longuement sur l'interpellation et la garde à vue des deux accusés. Une expertise médicale avait constaté des traces de coups sur Bensaïd et fera état d'hématomes sous les yeux et sur le visage. Les débats devaient donc répondre à cette question : a-t-il été " tabassé " pendant sa garde à vue comme il le raconte ou a-t-il été victime d'une interpellation musclée comme le prétendent les policiers ? Pour se faire une idée, la cour avait donc décidé d'entendre les policiers chargés de son arrestation et de son interrogatoire ainsi que les médecins qui l'ont examiné.

Bensaïd ne s'est pas fait prier pour raconter son arrestation, intervenue dans la soirée du premier novembre 1995, uste devant son domicile parisien du XVIème arrondissement. Il continue d'affirmer que les hommes de la DNAT l'ont " sauvagement " frappé pour le forcer à avouer l'attentat de Maison Blanche. Il avoue n'avoir pas compris grand chose ce soir là et il ne sait pas pourquoi la police lui a sauté dessus. "C'était la nuit. Ça s'est passé très vite. On passe d'une étape à l'autre, on n'arrive pas à assimiler dans la tête. C'était dans la rue. C'est comme un accident" raconte-t-il.
"Que veniez vous de faire?", interroge le Président.
"Rien d'important" lâche-t-il avant d'affirmer qu'il n'habitait pas dans cet appartement. Il ne sait plus comment il est arrivé devant la porte de la rue Félicien-David à Paris (XVIe) où logent des terroristes. Pour justifier sa présence ce soir là, il préfère évoquer : "Les circonstances. Le destin". Jean-Pierre Getti juge que "Ce ne sont pas des réponses satisfaisantes ".

UNE INTERPELLATION MUSCLEE.

Au sujet de son interpellation, le Président demande des détails, mais Bensaïd reste vague et imprécis:
" Je ne peux pas répondre à ces questions. Ce soir là, je suis tombé dans un guet-apens devant mon immeuble. J'ai entendu " police ! " et ça a été boum boum direct et tout ce qui s'ensuit. Ils m'ont défoncé. J'arrêtais pas de prendre des coups."
Mais il ne peut donner plus de précisions quant à ses agresseurs. Pour expliquer cette amnésie, il invoque la précipitation et la panique :
"C'est comme un mec normal et il y a un train qui lui rentre dedans. Il ne peut pas dire si le chauffeur a mis une cravate" explique-t-il avant de rajouter : "Ils se sont comportés tellement sauvagement que je ne pouvais pas croire que c'était la police".
L'enquêteur de la DNAT, Bernard Gence, qui a procédé en pleine rue à l'interpellation de Bensaïd a admis que celle-ci avait été violente : "Sur le terrain, ça a failli mal se passer". Il raconte qu'il était chargé de sa filature avec 4 policiers du RAID, mais au moment de l'arrestation, " nous n'étions plus que deux devant son domicile". Le policier a reconnu que des coups avaient bien été portés à ce moment-là. "On lui est tombé dessus. On a failli le perdre, il s'est débattu. On a dû y aller, euh, enfin, on a dû employer la force. Il s'est rebellé, il s'est débattu, il a compris qu'il avait une chance de s'enfuir. On savait à qui on avait affaire, ça a été mouvementé", explique M.Gence mais il nie que l'accusé ait été mal traité pendant sa période de garde à vue.

Le magistrat décide de passer à la garde à vue pendant laquelle, il a avoué sa participation à l'attentat de Maison Blanche. "Je donne un faux nom, on me tabasse, on me dit que la sécurité militaire algérienne se trouve dans le bureau d'à côté, qu'ils savent tout et qu'ils veulent une histoire." " raconte-t-il. Ils avaient le nom de Tarek (Ali Touchent), Ramda et le mien." D'ailleurs, ajoute-t-il, les policier me l'ont dit : " Faut que tu nous racontes une histoire ! Avec ces enquêteurs, on aurait tout avoué, même le tremblement de terre de mexico. " commente Bensaïd.
Il n'en démord par, il a été tabassé : "J'avais beaucoup de bleus dans les yeux et là et là", dit-il en montrant son visage. A l'issue de la garde à vue, le 2 novembre, Bensaïd est vu par un médecin qui constate la présence d'une ecchymose sur le front. Le 3 novembre, le docteur Deccour qui l'examine constate des "lésions traumatiques récentes sur la face" et demande une radio. Que signifie "récentes" interroge le président ?
"Quelques heures", répond Bertrand Deccour, tout en admettant qu'il est presque impossible de les dater précisément. Interrogé, le policier Gérard Masson nie qu'il y ait eu des coups portés pendant la garde à vue. "Au départ, c'était tendu", reconnaît-il, "lui comme nous vivions depuis quatre mois avec une pression certaine. Mais peu à peu, les choses se sont apaisées. Je me souviens d'avoir pris un café avec lui" explique t-il en regardant vers le box où se tient Bensaïd.
"Mensonges !" répond ce dernier. Sur ce sujet, la défense se tait, préférant rester discrète. "C'était une séquestration" déclare Bensaïd. C'est comme cela dit-il, qu'il a tout avoué : ses contacts avec les autres membres du GIA, la préparation des attentats et le passage à l'acte.

Le Président lui fait remarquer qu'il a pourtant confirmé certaines de ses déclarations devant le juge d'instruction : "Il y a donc des choses vraies dans ce que vous avez dit". Bensaïd balaye cet argument : "Tout ce qui a été écrit dans ce dossier avant 2000, c'est n'importe quoi".

Le président lui rappelle alors que les enquêteurs ont retrouvé à son domicile, un pistolet Beretta, un réveil, un fer à souder, du fil électrique, et "4,8 kilos de matière granuleuse de couleur jaune" (chlorate de soude) dissimulés dans un baril de lessive et qui entrent dans la composition des explosifs, ainsi qu'un impressionnant stock de piles. "Ce sont des produits légaux. Dans n'importe quelle maison vous trouvez des outils de bricolage " rétorque Bensaïd. Quant aux piles, il donne une explication : "c'est pour faire marcher un Walkman" et naturellement, cela use beaucoup de piles. Quant au chlorate de soude dissimulé dans un paquet de lessive, c'est parce qu'il "y a des plantes à la maison". Ses avocats sont affligés et dans l'assistance, c'est la consternation.

Le Président passe alors à la lecture des procès verbaux et notamment à la retranscription d'une conversation téléphonique entre Bensaïd et Belkacem qui précipitera d'ailleurs, leur arrestation. Dans cette dernière, ils évoquent la préparation d'un attentat sur un marché de Lille. Dans un langage grossièrement codé, les deux hommes parlent de truc à fabriquer avec un réveil. Il y est question de l'utiliser sur un marché ou dans une université, un endroit où il n'y a que des " mécréants ". "C'est une discussion de débiles ça, y manque plus que de dire: allez, va poser la bombe là!" interrompt Bensaïd.
"C'est quasiment ce qui est dit." rétorque le Président Getti. Au sujet de la bombe, Belkacem prévient son comparse qu'il n'a "pas pu la finir" car "c'est dimanche, j'ai pas pu acheter des bonbons ronds" (des écrous). Cette lecture fait bailler Bensaïd qui déclare toujours parfaitement à l'aise : " Je ne crois pas que ça intéresse la Cour ".

Plus posé, Ali Belkacem raconte son arrestation, le 2 novembre 1995 à son domicile de Villeneuve d'Ascq (Nord). A son domicile, les policiers retrouvent trois armes à feu dont un pistolet-mitrailleur Uzi ainsi que les composants nécessaires à la fabrication de l'engin explosif : réveil, chlorate de soude, bonbonne de gaz et des clous. Beaucoup de matériels ont été achetés dans un magasin près de son domicile comme l'atteste le ticket de caisse retrouvé chez lui. Mais Belkacem ne sait pas pourquoi, ni comment, ce ticket s'est retrouvé là : "Le logement était pas à mon nom."

Lors de sa garde à vue, il avoue être l'auteur de l'attentat du Musée d'Orsay. Le jeune algérien n'évoque pas de brutalité policière mais fait état de pressions, de menaces de représailles sur sa famille restée en Algérie. Il reconnaît avoir eu une conversation téléphonique avec Ben Saïd.
"On peut penser qu'un attentat se préparait." lui demande le Président. Belkacem avoue mais refuse d'en dire plus: "Oui. J'ai déjà été jugé pour ça, mais c'est pas avec Mehdi que je parle. J'ai déjà été condamné, jugé et je n'ai pas fait appel. C'est tout". Quant au coupon de carte orange qui atteste de sa présence près de la station Musée Orsay peu avant l'attentat, il reconnaît "Oui, oui , C'est bien la mienne". Il vient de valider la seule preuve matérielle de son implication dans l'attentat du RER. Au début de l'audience, le Président de la cour, Jean-Pierre Getti a annoncé qu'il entendrait le directeur adjoint de la Direction de la surveillance du territoire (DST) et un membre des renseignements généraux.

      Haut de page     


|Nous contacter|

|©Fidès| |Association loi de 1901| et
|Hébergée par I France|


   Sur le même sujet :
DOSSIER:
Les attentats de 1995


   FORUMS
Participez aux forums:
Les attentats de 1995

(Publicité)
L'HEBDO EN
PLUS