C'est deux là ne s'aiment guère, ne s'apprécient pas et cela ne date pas d'hier.
En 1987 déjà, Jean-Louis Debré écrit un roman "le Curieux", avec des flics et des filles de joie. A l'une d'elles, il donne le nom de Josiane Baladur, avec un seul «L». Edouard et son épouse ne lui ont jamais pardonné cette goujaterie.
Jusqu'à mardi, les deux hommes se sont affrontés dans une lutte sans merci pour l'accession à la présidence de l'Assemblée Nationale et cela ne fut pas sans leur déplaire. Pendant plusieurs jours, ils ont pu déverser leur rancoeur trop longtemps cantonnée à l'intimité de leur clans respectifs.
Pendant leur "grandes manoeuvres", ils ne se sont pas épargnés les petites phrases assassines même si cela ne s'est pas toujours fait directement mais plutôt par l'entremise de leurs supporters.
Dans un camps, on dénonce "la suffisance" de l'un et dans l'autre, on insiste sur "les capacités limitées" de l'adversaire. Les fausses rumeurs se répandent comme une traînée de poudre, une info en chassant une autre :
Ainsi, l'on apprend que Balladur abandonne la partie pour éviter une défaite humiliante. L'instant d'après, c'est l'UDF qui va soutenir l'ancien Premier Ministre dit-on, Jean-Louis Debré va donc devoir jeter l'éponge...
Edouard Balladur entreprend une véritable opération de séduction téléphonique. Il contactera avec plus ou moins de bonheur, tous les députés de l'UMP.
Jean-Louis Debré fort de ses soutiens part se mettre au vert mais continue de martèler ses bons mots dont il a seul le secret : «Si je suis au perchoir, ça sera pour aider le gouvernement et non pour lui mettre des bâtons dans les roues.» sous entendu, ce ne sera pas le cas avec Balladur.
La bataille est rude mais ce n'est pas une surprise car ces deux hommes n'ont pas grand chose en commun : l'un est toujours parfaitement courtois, distingué et raffiné, l'autre est plutôt gauche, rustre et trivial. Jean-Louis Debré paraît plus accessible alors qu'Edouard Balladur semble plus réservé.
Leur seul point commun est sans doute de devoir l'un comme l'autre, beaucoup à Jacques Chirac.
Dès 1986, ce dernier propulse E.Balladur dans les hautes sphères en lui confiant un ministère prestigieux, celui de l'Economie et des Finances avant de l'envoyer en 1993 à Matignon comme Premier Ministre.
Quant à Jean-Louis Debré, il se verra confier des postes à haute responsabilité au sein du RPR. Il deviendra même Ministre de l'Intérieur dans le Gouvernement Juppé en 1995.
En attendant, leur grande dissension a porté un mauvais coup au parti unique du Président l'UMP et a montré que la tâche de Jacques Barrot ne sera sans doute pas facile.
En effet, malgré les appels à la cohésion lancés par le nouveau Président de groupe, certains députés ont fait de la résistance préférant voter pour un candidat libre et non homologué par le grand parti unique. Les remontrances n'ont pas tardé car dès le lendemain M. Barrot qui s'exprimait sur LCI a adressé un nouveau rappel à l'ordre aux députés de son groupe. Évoquant le déplacement de voix intervenu la veille au détriment de M. Debré, le président du groupe a affirmé : "Il faudra que nos amis de l'UMP apprennent peut-être un petit peu plus les disciplines internes."
Mais M. Barrot apparemment, bon joueur a précisé néanmoins qu'il souhaitait "donner un rôle" à M. Balladur.
Un poste prestigieux lui a été effectivement réservé, celui de Président de la commission des affaires étrangères, un lot de consolation soit mais qui a sans doute pour objet également, d'éviter que M. Balladur fort de ses 40% de soutien, n'organise un véritable courant au sein de la très chiraquienne UMP.
Mais ce prix de consolation ne fait pas que des heureux. Pierre Lellouche (UMP-RPR) est furibard. Déjà absent du gouvernement Raffarin dans lequel il espérait obtenir le poste de secrétariat d'Etat aux affaires étrangères, le député attendait lui aussi la compensation promise, dit-il par Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin, et qui n'était rien d'autre que cette Présidence de la commission des affaires étrangères. "Si ça commence comme ça, sans parole et sans honneur, ça finira très mal" ne cesse-t-il de répéter.
Dur, dur la cohésion Monsieur Barrot!!!