Ce sont des propos tenus par Michel
Houellebecq au magazine Lire qui lui avait valu d'être poursuivi par des associations
pour "complicité de provocation à la haine raciale et
injure raciale
en raison d'une appartenance religieuse". Dans un entretien, l'écrivain avait déclaré que :
"La religion la plus con,
c'est quand même l'islam. Quand on lit le Coran, on est effondré... effondré".
Il avait également estimé que depuis
son apparition, cette religion était "dangereuse".
Le droit à la critique religieuse
Lors de l'audience du 17 septembre dernier, l'écrivain avait nié avoir une quelconque aversion
pour les musulmans mais avait revendiqué son "mépris pour l'islam" et son droit à critiquer
les religions monothéistes : "La Bible a plusieurs auteurs, certains géniaux, certains nuls à chier,
le Coran en a un seul plutôt médiocre (...) Les textes fondamentaux monothéistes
ne prêchent ni la paix, ni l'amour, ni la tolérance. Dès le départ,
ce sont des textes de haine", avait-il précisé à la barre. Le ministère public avait réclamé
la relaxe estimant que les propos tenus par Michel Houellebecq
visaient l'islam et non les musulmans. La procureure Béatrice Angelelli avait également considéré que les
magistrats
n'étaient "pas là pour dire ou faire la morale mais pour sanctionner une responsabilité
pénale".
Le terme "con" ne visait pas les musulmans
Dans leur jugement, les magistrats de la 17ème chambre correctionnelle ont estimé que
les propos tenus par l'auteur de Plateforme n'étaient
"sans doute pas caractérisés, ni par une particulière hauteur de vue,
ni par la subtilité de leur formulation" mais ils n'y ont vu aucun délit mais plutôt la critique "d'un système de
pensée".
Le terme "con" employé dans l'entretien ne visait pas les musulmans
et même s'il avait "une connotation outrageante ou à tout
le moins méprisante", il s'adressait à toutes religions.
"Ce propos ne renferme aucune volonté d'invective, de mépris ou d'outrage envers
le groupe de personnes composé des adeptes de la religion considérée", ont estimé les magistrats qui
ajoutent
que la critique des textes anciens "n'est pas en elle-même constitutive d'une
injure et ne peut en tout état de cause viser les musulmans d'aujourd'hui".
Les juges ont estimé que si l'auteur exprime "de la haine" envers l'islam,
il ne le fait pas envers les musulmans :
"Ecrire que l'islam est la religion la plus con ne revient nullement à affirmer
ni à sous-entendre que tous les musulmans devraient être ainsi qualifiés.
Ce propos ne renferme aucune volonté d'invective, de mépris ou d'outrage envers
le groupe de personnes (...) considéré", relève le jugement.
Une mauvaise connaissance de l'islam
Les avocats des associations se disent déçus par la décision de la 17ème chambre correctionnelle
de Paris.
Maître Jean-Jacques Varaut, l'avocat de la mosquée de Paris a fait part de son intention d'interjeter
appel. "Cette décision semble inspirée par une mauvaise connaissance de l'islam car on dit
qu'injurier le Coran ne serait pas porter atteinte à la communauté musulmane.
Dans une société où le privé et le public ne sont pas distingués, (...) outrager le Coran,
c'est outrager l'islam", a-t-il déclaré aux journalistes.
Par contre, Maître Emmanuel Pierrat, le défenseur de Michel Houellebecq était très satisfait :
"Je constate avec beaucoup de satisfaction que le délit de blasphème n'a pas été restauré
en droit français. Le tribunal a reconnu le principe de liberté d'expression" a-t-il relevé.
L'écrivain qui vit en Irlande n'était pas présent lors du jugement. A l'audience, il avait reçu le soutien
de plusieurs écrivains et journalistes et notamment de Salman Rushdie qui dans un journal britannique
avait pris sa défense en estimant que "dans ce procès, les deux parties avaient déjà perdu.
La réputation de Michel Houellebecq a été compromise et ses adversaires islamiques
sont apparus, une fois encore, comme des opposants à la liberté de parole".
Quant à l'auteur de Plateforme, qui risquait jusqu'à un an de prison et 45 000 euros d'amende,
il avait déclaré en septembre dernier :
"Les médias, pour moi, c'est fini".