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BILLET PSY...
Les nouveaux tyrans.

Des tueurs en série d'un autre type : les pervers narcissiques. Ils n'ont pas l'air dangereux. Mais malgré une apparence humaine et charmeuse, ce sont de véritables " serial killer " tant leurs victimes sont nombreuses.


Lundi 09 décembre 2002

Aurore Mercier

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"Le pervers n'a aucune vie personnelle, aucun but véritable, si ce n'est de détruire celui qu'il a en face de lui. Il s'approprie souvent les idées des autres, les convictions des autres."


 

Que vous inspire le témoignage d'Aïcha?

- Une triste histoire mais malheureusement bien connue et qui n'est compréhensible le plus souvent, que par quelqu'un qui l'a vécue intimement. En premier lieu, il est important de préciser que contrairement à une idée reçue, la victime n'est pas nécessairement une personne faible, sans volonté. En général, elle est remplie de joie de vivre, est consciencieuse, pleine d'humanité et possède de vraies qualités humaines. Elle peut parfois cependant, manquer de confiance en elle, douter de ses propres capacités. Lorsqu'elle débute au sein de l'entreprise, elle déborde d'énergie, s'investit pleinement. C'est un peu le profil de ces " employés modèles " qui ne comptent pas leur temps. Ainsi, ils peuvent faire des heures supplémentaires, travailler le week-end, emmener des dossier à leur domicile sans aucune contrepartie financière. C'est le harcèlement subi qui va retirer toute cette vitalité, tout ce tonus. Il n'est pas rare que la victime s'aperçoive de l'étendue des dégâts subis, beaucoup plus tard.

Et le profil de l'agresseur ?

Lui, peut-être un homme mais aussi une femme. C'est très souvent un pervers narcissique, incapable de considérer celui qu'il a en face de lui comme une personne humaine. Il aime le pouvoir ou œuvre pour dissimuler sa propre incompétence. C'est un être qui ne s'aime pas et qui ne peut exister qu'en se valorisant aux dépens des autres. En fait, il projette sur autrui ses propres faiblesses ou ses frustrations qu'il ne parvient pas à admettre. C'est un prédateur qui ne ressent ni compassion, ni culpabilité et qui ne voit rien de négatif dans son comportement. De prime abord, c'est souvent quelqu'un de séduisant, de gentil, d'ouvert qui sait utiliser son charme, sa séduction. Souvent sa voix est douce, posée…. Mais en privé : il est arrogant, méprisant, haineux et souvent menteur pathologique. Seule sa victime connaît son véritable visage. Il aime aussi faire état de compétence qu'il ne possède pas. On constate chez lui, des comportements exacerbés : une nette tendance à la discrimination sexuelle, voire au harcèlement sexuel, à la violence, aux préjugés raciaux…Le portrait du patron d'Aïcha est en ce sens très révélateur. L'étranger devient responsable de tous ses échecs et de toutes ses frustrations. C'est aussi quelqu'un qui tient rarement ses engagements. Les promesses faites lui permettant plutôt de convaincre, de séduire, de ramener vers lui quelqu'un qui lui échappe. Il aime créer le doute dans l'esprit de sa victime, il adore " la promener " avec des excuses qui pourront marcher sur le coup ou tout au moins semer le doute. Le fait que sa victime soit enclin au pardon ou à la pitié va le servir énormément. C'est cette dernière qui pourra se sentir trop dure ou trop sévère. Ainsi, il peut faire des cadeaux, des invitations, chercher à rendre service. Mais tout ceci n'a qu'un but, vous empêchez de réagir et bloquer votre raisonnement , vous faire passer pour l'ingrat, le méchant. Il pourra toujours témoigner en cas de problème de sa " largesse à votre égard ". Il aime imposer ses idées, ses opinions : ses ennemis devront devenir vos ennemis et ses amis, vos amis. Il aime tout contrôler et montre un besoin de tout critiquer. Ceux qui l'entourent ne seront jamais mis en valeur. Quand il discute avec vous, il saute d'un sujet à l'autre, lorsque vous sortez d'un entretien vous avez alors le sentiment de ne pas avoir eu de conversation cohérente. Parler des autres ne l'intéresse pas. Il veut concentrer toute l'attention sur lui et apparaître comme une personne exceptionnelle, charitable et pleine de compassion. Le contraire de ce qu'il est en vérité. Le pervers n'a aucune vie personnelle, aucun but véritable, si ce n'est de détruire celui qu'il a en face de lui. Il s'approprie souvent les idées des autres, les convictions des autres.

Pourquoi comme dans le témoignage d'Aïcha, cette situation dure-t-elle aussi longtemps ?

Simplement parce que son patron a su créer des liens tout à fait particulier entre lui et elle. Des liens qui l'empêchent de prendre conscience de la situation et de réagir. C'est un mécanisme assez complexe et qui varie sensiblement d'une personne à l'autre. Mais pour faire simple, le pervers est quelqu'un qui montre constamment un double visage et qui jour sur l'ambiguïté. Il sourit mais dans le même temps, il détruit par l'humiliation et par des paroles blessantes. Et son attitude est déstabilisante parce qu'il alterne méchancetés et excuses, mépris et cadeaux….Il joue constamment au jeu du chat et de la souris. Sa victime ne sait jamais sur quel pied danser. Parfois c'est elle qui peut-être prise de pitié pour son agresseur ou se sentir devenir un peu trop méprisante. En outre, cette dernière a souvent une certaine facilité à pardonner autrui et puis elle n'a plus d'énergie, elle est vidée, elle n'a plus le courage de réfléchir, ni de se battre. De toute façon, il l'entretient dans ce flou et ne manque jamais de lui dire qu'elle n'a pas compris, que c'était une plaisanterie, qu'elle manque d'humour, que c'est elle, la parano….Cette ambiguïté entretenue met mal à l'aise et c'est elle qui permet d'ailleurs à l'agresseur de nier.

Comment la victime sort-elle de cette manipulation ?

Elle n'en sort jamais indemne parce que cette violence perverse subie pendant de nombreuses années a dégradé fortement la perception qu'elle a d'elle-même. Elle doute très souvent, elle peut même se considérer comme étant la source du problème. En tout cas, elle est toujours fortement déstabilisée. Surtout que vu de l'extérieur, il passe pour quelqu'un de très gentil, de très tolérant. Et outre une souffrance psychologique, on trouve fréquemment, une altération de la santé : des problèmes de peau, de l'asthme… des tas de troubles physiques.

Et judiciairement, comment cela se passe ?

C'est un autre " chemin de croix " qui débute dans ce cas là parce que souvent, il n'y a pas de témoins de cette agression ou alors ce sont des gens qui la cautionnent ou qui ne veulent pas y croire. Parce qu'il faut savoir qu'il aime également énormément monter les gens, les uns contre les autres. C'est une vraie jouissance pour lui. Le jour où il décide d'en terminer avec sa victime, il créé une sorte de réseau contre elle pour finir son travail de destruction. Tout ce qui pourra nuire à sa réputation sera utilisée. C'est un de ses jeux préférés parce qu'il y teste son pouvoir, son emprise sur autrui. Il peut y consacrer des heures. Il tisse une véritable toile d'araignée. Ainsi, il saura parfaitement choisir les personnes qui pourront lui être utiles dans cette manœuvre. Il saura trouver les arguments pour les convaincre. Ce sera eux qui vont travailler pour lui et " attaquer à sa place ". Il n'est pas rare que la victime finisse complètement isolée sur son lieu de travail. Quant à ceux qui ne sont pas dans le réseau de ce pervers mais qui sont dans son environnement immédiat, ce sera presque impossible pour la victime d'y trouver des témoins. Lui, il passe pour quelqu'un de formidable et d'humain. Ce qui fait que la victime peut très bien ne pas être crue et cela arrive encore trop fréquemment, malheureusement. Surtout que la situation est toujours complexe et la raconter n'est pas toujours facile immédiatement.

Mais elle ne doit pas pour autant se taire !

Certainement pas et il est essentiel d'en parler. Sinon, la victime aura du mal a se reconstruire, et des années après, la seule pensée de revoir son agresseur peut lui donner une profonde angoisse. Dans ce cas, il ne surtout pas s'isoler. Au contraire, il faut demander de l'aide, se regrouper, discuter, échanger. Il faut raconter son histoire, dire sa souffrance même si cela peut paraître décousue ou incroyable. Au début, ce sera nécessairement embrouillé mais à force de raconter, les souvenirs vont devenir plus précis et les évènements vont reprendre leur place et se structurer. Comprendre, c'est aussi le début d'une nouvelle vie et de l'oubli.

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